Il ne fallait pas avoir froid aux yeux. Lorsque Cyril Pagès est contacté au lendemain des Jeux Paralympiques de Londres où le bilan des judokas s’est réduit à un zéro pointé, le chantier est important. « C’était un vrai challenge sportif, admet l’entraîneur du pôle d’Orléans. L’équipe était en fin de cycle et le staff cherchait un entraîneur. » Ses connections avec Olivier Duplan, le directeur sportif de l’équipe de France handisport et Olivier Busnel, en charge de la commission handisport à la FFJ, le poussent à accepter.
Ses missions : aider les meilleurs à décrocher leur sésame pour Rio et installer les plus jeunes dans une vraie démarche de haut niveau. « Il n’est pas simple pour un judoka en situation de handicap d’entrer dans une structure haut niveau, estime cet ancien champion de France. La FFJ doit progresser dans ce domaine. Si l’intégration des personnes en situation de handicap se fait bien dans les clubs, elles ne sont pas dirigées assez tôt vers la compétition et la pratique à haut niveau. »
Durant ces trois années, Cyril Pagès a donc établi, en étroite collaboration avec le DS de la discipline à la FFH, un cadre à suivre. « Cela n’a pas été simple et provoqué une petite cassure car tout le monde, pour des raisons diverses (scolaires ou autres) n’ont pas pu tenir les exigences.»
A l’arrive, l’équipe de France ne disposera que de deux représentants à Rio. Sandrine Aurières-Martinet, 33 ans, en quête de revanche après sa quatrième place à Londres et Cyril Jonard, 40 ans, de retour aux Jeux. « Je m’étais préparé à cette éventualité de n’avoir que ces deux judokas à Rio depuis environ deux ans, souligne Cyril Pagès. Cela demande donc des compromis et engendre une certaine manière de travailler puisqu’ils sont bien installés dans leur vie. » Néanmoins, tout s’est bien mis en place via un stage par mois et des échanges réguliers avec les sportif et leur entraîneur.
Cyril Pagès a aussi dû travailler à partir d’une solide base. Ses protégés ont également un riche vécu derrière eux. A commencer par Cyril Jonard, médaillé d’or à Athènes et d’argent à Pékin. « Nous devions aussi apporter des clés techniques supplémentaires pour répondre à l’évolution de l’adversité. Le tout en s’assurant qu’il sera prêt physiquement. » Élargir la palette à cet âge-là n’était pas forcément facile.
L’approche avec Sandrine Aurières-Martinet, médaillée d’argent à Athènes et à Pékin, a été un peu différente et adaptée à l’adversité. « Elle a les moyens de faire tomber tout le monde, assure l’entraîneur des Bleus. Mais elle devait absolument être apte physiquement. Avec la blessure contractée à la cheville en février, cela n’a pas été simple. Mais son retour à la compétition s’est avéré rassurant. » Dans les deux cas, outsiders, décrocher une médaille est à leur portée. Après deux deuxièmes places à Athènes et Pékin, Sandrine Aurières-Martinet rêve d’or.
Cyril Pagès, qui va, pour sa part, découvrir l’univers des Jeux paralympiques, a aussi insisté sur un aspect mental. « L’idée étant de ne pas faire trop différemment sous prétexte que ce sont les Jeux. Tout le monde connaît l’importance de ce rendez-vous, il n’est pas nécessaire d’en rajouter. » // J. Soyer
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