Le sport a toujours fait partie de sa vie. « Petite, je regardais les Jeux olympiques en rêvant d’être sportive de haut niveau. Mais en me disant que je ne pourrai pas en raison de ma malformation. »
Un rêve devenu réalité. Marie Patouillet, 31 ans, est devenu vice-championne du monde de paracyclisme sur 500 m arrêté et omnium. Un an après une première médaille de bronze mondiale sur 500 m. Aujourd’hui, elle se focalise sur les Jeux Paralympiques de Tokyo 2020 qu’elle devrait concourir. « L’adversité a progressé mais elle a parfaitement suivi le rythme, voire mieux », apprécie Laurent Thirionet, responsable du haut niveau pour la commission paracyclisme de la FFH.
Marie Patouillet est, en effet, née avec une malformation au pied et à la cheville ainsi qu’avec une importante différence de longueur entre les deux jambes. « Je suis née avec la moitié du pied gauche. En plus de ça, il y a une malformation interne au niveau de la cheville, j’ai une partie des os fusionnés donc j’ai une mobilité réduite, développe la Francilienne. L’inégalité a été réduite à l’âge 10 ans. On a freiné la croissance d’une jambe. »
L’opération, les contrôles radio, les visites annuelles chez le chirurgien orthopédique, les rencontres liées effectuées dans ce milieu, nourrissent un autre rêve. « Celui de devenir médecin », lance-t-elle. L’enfant de Versailles, où elle a grandi avec son frère et ses deux sœurs, tous plus jeune qu’elle, construit sa vie animée par cette envie. À 18 ans, elle intègre la santé navale à Bordeaux. Le hand et surtout la course à pied continuent de rythmer sa vie de médecin militaire. « J’ai toujours aimé les sport collectifs. » Mais moins d’un an après s’être lancée dans le rugby, sa malformation se dégrade et il lui devient impossible de courir. « J’avais le choix entre la natation et le cyclisme. » Le water-polo la tente mais les horaires des séances et des ouvertures des piscines sont incompatibles avec son emploi du temps de médecin. « Et dans le même temps, on m’a offert un dossard pour l’étape du Tour en 2017. » Après 9 h 23 passés avec la voiture balai, Marie Patouillet franchit la ligne d’arrivée et se découvre une nouvelle passion. « J’y ai pris beaucoup de plaisir. J’ai commencé sur la route mais on m’a dit que je progresserai plus vite en faisant de la piste. » Un coup de foudre.
Depuis deux ans, elle s’est donc consacrée à cette discipline. Et depuis un an, son mentor n’est autre que Grégory Baugé. Tous deux l’ont préparé pour le 500 m départ arrêté, malgré un profil plus adapté à la poursuite et aux efforts aérobics. « Comme le dit Grégory, ce n’est pas la taille des muscles qui comptent mais ce qu’il y a dedans. »
Après la 3e place aux Mondiaux handisport 2019, elle a confirmé cette année toujours sur le sprint, mais aussi sur l’omnium. « Aux championnats du monde 2019, j’étais outsider, sans connaître vraiment mon niveau mais en sachant juste que je prenais du plaisir sur cette épreuve du 500 m arrêté. J’ai aussi assez rapidement senti que le sport de haut niveau demande beaucoup d’exigences et de sacrifices. Pour pouvoir faire des sacrifices de manière assez radicale, il fallait absolument une discipline qui me plaise énormément. Le 500 m me plaît plus que la poursuite. » Au regard de son profil, « son mérite de perfer n’en est que plus grand », appuie Laurent Thirionet.
Sacrifice et travail ne sont pas que des mots chez Marie Patouillet, levée quasiment tous les matins entre 5 h et 5 h 30. « Je démarre ma journée par une séance de musculation entre 6 h et 8 h puis je travaille comme médecin généraliste, effectuant des remplacements trois jours ou trois jours et demi par semaine et je m’entraîne à l’Insep ou à Saint-Quentin, pour avoir des repères sur une piste de 250, le soir. » Des journées bien remplies pendant lesquelles l’ancienne élève du Conservatoire ne parvient pas à s’évader via quelques notes de piano, un instrument dont elle a joué douze ans. « C’est mon seul regret mais après Paris 2024, j’y reviendrai. »
Décrite comme « perfectionniste » par Laurent Thirionet, la Cristolienne, qui estime avoir été à bonne école pour surmonter les exigences du haut niveau, via ses études de médecine, peut se projeter pleinement vers les Jeux japonais. Elle devra faire face à une concurrence plus rude étant donné que deux classes de handicap sont réunies. Idéal pour décupler sa soif de travail et son envie de progresser.
Sa progression passera par la suite de sa planification, établie, dès le départ, dans l’optique des Jeux Paralympiques de Tokyo 2020. « J’ai commencé la piste il y a deux ans. La 1ere année fut de la découverte. L’entraînement spécifique piste a démarré il y a seulement un an. Il a fallu m’apprendre la muscu, à encaisser de lourds entraînements de piste, en passant par du lactique et de la force, développe-t-elle. Les championnats du monde étaient un gros objectif à ne pas louper. Alors on a travaillé avec ce que j’avais déjà, en prenant mes muscles tels quels. On a fait le maximum pour que je sois la plus forte possible. »
Un nouveau cycle de travail va s’enclencher. « On va passer par des gros cycles de musculation que nous n’avons pas encore faits. Je risque de déguster dans les prochaines semaines. »
Marie Patouillet va également avoir le nouveau vélo Look, sorti pour les Jeux, actuellement en cours de fabrication. Et effectuer des tests d’aérobie. « Tout ça n’a encore jamais été fait. Il y a encore énormément de progrès à faire. Même si le temps paraît encore un peu lointain, mais il y a un an et demi je faisais 44 secondes au 50à. Là, je fais 37,5 secondes… »
Après, les Jeux paralympiques de Tokyo, qu’elle a en ligne de mire, Marie Patouillet entend se diversifier. Surfer sur sa deuxième place mondiale en omnium. « L’année prochaine et dans l’optique de Paris 2024, de la poursuite, je vais en manger. Mais pour le moment, psychologiquement, je n’étais pas prête à affronter toutes ces épreuves d’un coup. J’ai choisi de me spécifier dans le 500. Compte tenu de mon gabarit, le crois que c’est plus facile de passer du sprint à l’endurance, que l’inverse. »
Rédaction : J. Soyer / Photo : J-B.Benavent
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