Il rêve de damner le pion à Damien Seguin. Kévin Cantin aimerait chiper l’unique place réservée à la France en 2.4, aux Jeux paralympiques de Rio 2016, à son aîné. Avant d’en découdre directement lors des Mondiaux IFDS, la compétition de sélection, le skipper olonnais de 24 ans va réviser ses gammes lors des championnats du monde open disputés du 8 au 15 août en Finlande.
« Disputer ceux de Rio me tient vraiment à cœur, explique sans fausse modestie, ni excès de confiance, Kévin Cantin. Il n’y a qu’une place et celle-ci semble promise à Damien Seguin. Mais l’écart qui nous sépare se resserre peu à peu. »
La cinquième place du Vendéen sur la manche de Coupe d’Europe à Kiel, avant l’été, confirme ses progrès et s’inscrit dans la continuité de la dixième place obtenue au mondial canadien, en 2014. « Il n’aurait pas volé la troisième place en Allemagne, assure Thierry Poiret, l’entraîneur national. Au cours de cette manche européenne, Kévin a montré qu’il faisait partie des grands. Il a su leur poser problème et rester à leur contact. Seule la chance a manqué pour le podium. »
Le podium, Kévin Cantin était dessus lors des trois premiers jours de compétition. Avant d’être, d’une part, victime d’une bonne journée du Suédois et d’autre part, d’un vent capricieux et défavorable. « Si la déception l’emportait juste après, le bilan de cette épreuve allemande est positif. Les stages à l’École Nationale paient. J’ai gagné en concentration et en constance. Mes choix tactiques sont meilleurs. »
Ses derniers résultats démontrent le chemin parcouru par l’Olonnais depuis ses premiers bords sur Optimist. C’était en 2002. Deux avant sa première rencontre avec son aîné tricolore.
Damien Seguin s’en souvient avec précision : « Je revenais des Jeux d’Athènes (qu’il a gagnés). Une rencontre avait été organisée entre le SNO Nantes, mon club, et celui de Léo Lagrange. C’est à cette occasion que j’ai rencontré Kévin, avec sa mère. » Grand prématuré, ce garçon infirme moteur cérébral des membres inférieurs se projette dans le parcours de Seguin. L’histoire de Kévin Cantin, qui marche difficilement, est lancée. Si le monde de marin-pêcheur, dans lequel baigne sa famille, est incompatible avec sa maladie (muscles plus courts que les os), celui de la voile de compétition ne l’est pas.
En 2008, Kévin Cantin retrouve Damien Seguin, à l’ENV de Quiberon. L’Insep de la voile en quelques sortes. Depuis, Kévin Cantin a adopté un rythme de sportif de haut niveau. « Je mange, je bois, je dors voile. Du matin au soir, je pense au bateau. » Il doit jongler entre le boulot de caissier, les entraînements et les compétitions. Pas simple, malgré la convention d’insertion professionnelle qui lui permet de consacrer 70 % de son temps de travail à son projet sportif. « Il veut devenir skipper de haut niveau et pas caissier d’élite, résume Damien Seguin. Mais actuellement, il doit en passer par là. »
Pour continuer à rêver des Jeux, si le Comité International Paralympique reprend la voile après ceux de Tokyo 2020. « Il ne vit pas très bien le fait qu’un seul Français puisse aller aux Jeux. Mais je lui ai dit que je ne lui donnerai jamais ma place, prévient Seguin. Il devra la gagner. »
En s’appuyant sur l’expérience acquise au contact des meilleurs. « Désormais, je l’intègre à toutes les préparations, souligne encore le chef de file français. Je l’associe à mes débriefings, à mes réflexions sur l’évolution du bateau. Je partage mes analyses tactiques et techniques avec lui et je lui donne davantage de responsabilités… » Sans oublier que l’association Des pieds et des mains a également largement contribué, sur le plan financier, au développement du projet de Kévin Cantin.
Ce dernier est d’ailleurs bien conscient de sa chance. « Il me tire vers le haut et je bénéficie des conseils d’un grand champion. » Un champion qu’il entend égaler, voire dépasser, en Australie, à la fin de l’année. Aux Mondiaux IFDS, les deux Français seront concurrents. Cette fois l’issue finale n’est pas écrite à l’avance… //
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