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Mondial : l’équipe de France fait le plein de confiance avant Paris 2024

25 mars 2024
A Rio, lors des championnats du monde sur piste (20-24 mars 2024), l’équipe de France de paracyclisme espérait faire au moins aussi bien que l’été dernier, à Glasgow (14 médailles dont 7 titres). Les Bleus de Laurent Thirionet, responsable de la performance de la discipline à la Fédération Française Handisport ont encore embelli leur bilan, avec 19 médailles, dont 12 en or (5 argent et 2 bronze). Un bilan inédit.

Seul petit bémol, les quatre équipages de tandem n’ont décroché qu’une médaille d’argent. En revanche, emmenée par ses ténors, tel Alexandre Léauté qui a décroché ses 10e, 11e, 12e et 13e titres mondiaux sur piste, la délégation a vu l’émergence de Gatien Le Rousseau qui revient du Brésil avec trois médailles, dont un titre sur l’omnium. L’équipe de France, qui termine à la 3e place du classement des nations, a fait le plein de confiance et de sérénité avant les Jeux paralympiques de Paris 2024 (28 août – 8 septembre).

Laurent, Thirionet, quelle belle dernière journée (6 médailles d’or, 1 argent, 1 bronze) ?
C’est certain. On enchaîne les podiums depuis toute à l’heure. Là, on vient de chanter la Marseillaise avec une grande partie de la délégation, pour l’or de Marie Patouillet. On n’a eu que des belles journées malgré un peu de déception avec nos tandems. Ce sont des équipages de qualité mais tout neuf, avec peu d’expérience sur la piste. Il y a du travail. Mais globalement, tout le monde a bien roulé. On repart avec un beau bilan.

Ce mondial récompense pleinement tout ce que vous avez mis en place, avec votre staff, pour être performant sur la piste.
C’est un travail démarré en 2018 quand j’ai repris l’équipe. On a commencé timidement avec quelques stages. Aujourd’hui, on a une vraie équipe de pistards. Avant, on n’avait que des routiers qui faisaient un peu de piste. Là, on enchaîné deux stages d’une semaine par mois depuis novembre, donc c’est la moitié de ton temps. On a pu investir grâce au soutien de l’A.N.S  dans beaucoup de matériel et de savoir-faire. La soufflerie, des capteurs de puissance, des vélos haut de gammes. La F.F.H a fait des choix fort en terme de fléchage de moyens financier et ces choix fait depuis six ans porte leur fruits. On est encore un peu en retard par rapport aux Anglais qui ont commencé en 2012 leur stratégie de travail sur piste mais on vient quand même les titiller. C’est vraiment bien. Les Chinois sont même venus aux renseignements pour savoir si nos entraîneurs avaient des projets pour l’avenir et quels étaient leurs émoluments. Ça veut dire que les gens nous regardent.

Huit mois après le bon bilan écossais et à cinq des Jeux paralympiques de Paris, quels sont les points très positifs ?
On fait un bilan un peu similaire à celui de Glasgow. On a connu quelques belles surprises, différentes de celles de Glasgow mais tout cela s’équilibre. C’est un beau bilan. À l’approche des Jeux, le seul point de vigilance au niveau de la délégation française porte sur la catégorie tandem. Pour le reste, on est prêt. On a des profils de gagnants et pas simplement des profils de médaillables. Dans les pays comme les nôtres, par opposition à l’Australie et aux pays de l’hémisphère sud, on sort tout juste de l’hiver et on constate que les athlètes Français sont déjà en forme. Ce n’est que le début de la saison. On sera encore plus fort au mois d’août.

Il faut aussi mettre en perspective ce beau bilan par rapport au programme paralympique où toutes les épreuves des Mondiaux ne sont pas courues et où certaines épreuves sont factorisées (c’est-à-dire que sportifs de catégories différentes vont être rassemblés)…
À Paris, on s’est fixé de remporter 20 médailles (piste et route) et d’essayer d’approcher les dix titres. C’est quelque chose de réalisable. Sur les courses au programme des Jeux, nous avons de vrais candidats à la médaille. De supers potentiels de médailles d’or et de podiums. Je pense que le bilan que l’on fera aux Jeux, en termes de classement des nations, sera plus à notre avantage.

Que dire de l’arrivée de cet Anglais sur la poursuite MC4 ?
Oui, là il y a un nouveau candidat sérieux. Archibald Atkinson a progressé en quelques mois. En plus, il a 20 ans, il est sympa, il a une belle gueule…

Plus globalement, comment jugez-vous l’évolution de l’adversité ?
Comme lors de chaque compétition internationale, on a découvert quelques nouveaux. Des athlètes que l’on n’imaginait pas forcément capables de se lancer dans la course aux Jeux, mais qui finalement y sont. On a quelques profils à surveiller sur quelques courses mais ce n’est pas dramatique. Chez les tandems, le niveau grimpe, avec l’arrivée notamment d’équipages italiens qui s’appuient sur des guides de niveau élite. Les Chinois sont toujours impressionnants mais à l’inverse, les Espagnols, réputés parmi les nations fortes, souffrent. Il y a des cycles.

« Notre avenir s’annonce bien » 

Entre le final de Marie Patouillet, ce dimanche, les deux nouvelles médailles d’or d’Alexandre Léauté, les trois médailles de Gatien Le Rousseau et l’or de Heidi Gaugain, la France brille à tous les étages
Oui, Marie qui gagne l’omnium et le scratch. Elle a eu le cran et l’audace de jouer le sprint sur le dernier tour et de tout donner jusqu’au bout. Heidi n’a pas démérité et a eu un rôle déterminant sur cette course, aussi stratégique soit-elle. Cette équipe de France possède de solides arguments aussi parce qu’elle compte pas mal de jeunes. On ne va pas connaître une fin de cycle après les Jeux de Paris.

On ne peut pas, ne pas parler d’Alexandre Léauté, quatre médailles d’or et un record du monde sur le km…
Aujourd’hui cela paraît presque normal, alors que ce qu’il réalise est juste extraordinaire. Aux Jeux, il ne pourra pas remporter autant de médailles car il n’y aura pas toutes les disciplines présentes lors de ces mondiaux, mais il a clairement le potentiel pour décrocher quatre médailles d’or (2 sur la piste et autant sur la route). J’espère le voir gagner le contre-la-montre, finir 1er ou 2e au kilomètre et aller jouer le podium sur la course en ligne.

A Glasgow, vous aviez souligné les progrès que le collectif devrait faire dans le vivre-ensemble…
Oui. On a vraiment passé une belle semaine. On dit quand des choses ne vont pas mais il faut aussi dire quand tout va bien. Cette semaine, tout s’est vraiment bien passé. On a parfois des points de divergence avec des sportifs mais ce ne fut jamais le cas cette semaine. On progresse.

 «  Notre Koh-Lanta a duré sept ans » 

Avant les Jeux, il y aura deux coupes du monde sur route, Qu’en attendez-vous ?
On attend d’avoir des confirmations. De voir ce que sont capables de faire nos routiers purs, surtout en handbike. Aujourd’hui, on est fixé sur la piste mais des demains on sera tourné sur la route. Nous le savons la France va connaitre lors de la sélection au jeux des problèmes de riches. On aura probablement deux ou trois athlètes, potentiellement médaillables qui ne verront pas Paris 2024. 

Que retenez-vous comme image forte de ces championnats du monde brésiliens ?
La cohésion du groupe est très bonne. On a vu de belles images, à l’image de la délégation française réunie au pied du podium de Marie Patouillet pour chanter la Marseillaise. Ce sont des images que l’on veut voir. On est fiers d’avoir tous ces athlètes, d’avoir tous ces staffs qui travaillent sans compter. On va vivre de beaux moments au mois d’août. On a construit quelque chose de beau et on arrive au bout du processus. On attaque la dernière ligne droite. C’est une superbe aventure de personnes qui s’apprécient. De gens qui ne se connaissaient pas, qui se sont découverts comme athlètes, comme staffs. C’est un peu comme les personnes qui font Koh-Lanta. Sauf que pour nous, notre Koh-Lanta a duré sept ans et on va le terminer cet été.

Les 19 médailles françaises

Marie Patouillet (WC5 – US Créteil cyclisme) – membre de l’Armée des champions 
2 or (Scratch et omnium) ; 1 argent (CL 500 m).
Heidi Gaugain (WC5 – Urt vélo 64) 
1 or (poursuite 3 km),
Christelle Ribault (WC2 – AVG Cyclisme)  
1 bronze (Scratch)
Alexandre Léauté (MC2 – VCP Loudéac) – membre de l’Armée des champions
4 or (poursuite 3 km, km, scratch, omnium)
Gatien Le Rousseau (MC4 – Cofidis compétition) 
1 or (omnium), 1 argent (scratch 15 km), 1 bronze (poursuite 4 km)
Kévin Le Cunff (MC4 – Dunkerque cyclisme handisport) 
1 or (scratch 15 km), 2 argent (poursuite 4 km et omnium)
Dorian Foulon (MC5 – Urt vélo 64) – membre de l’Armée des champions  
3 or (poursuite 4 km, omnium, scratch),
Raphaël Beaugillet/Quentin Caleyron (association sportive des handicapés blésois)  membre de l’Armée des champions  
1 argent (vitesse tandem).  

 

ZONES MIXTES 

Marie Patouillet (WC5) après ses titres sur scratch et omnium  
« Pour mes derniers championnats du monde, terminer sur ces deux médailles d’or, je ne pouvais pas rêver mieux. Au départ, je voulais surtout gagner l’omnium, sans me soucier du scratch parce qu’à vouloir courir deux lièvres à la fois on peut se perdre. Finalement, la Néo-Zélandaise était dangereuse mais à deux tours de la fin, quand j’ai vu Heidi (Gaugain) sortir, j’y suis allée. J’ai senti que j’avais les jambes pour aller chercher le sprint sur le dernier tour. »

Dorian Foulon (MC4), trois titres mondiaux (poursuite 4 km, omnium, scratch) : 
« Je pouvais jouer l’or sur le scratch que je n’avais jamais eu. Après il y avait aussi l’omnium avec des adversaires un peu particuliers à appréhender. Finalement, deux adversaires, pas dangereux sont partis mais je ne pouvais pas sauter sur tout le monde, je me suis donc focalisé sur l’omnium, Mais les faits de course ont fait que les planètes se sont bien alignées et ça s’est mis bien, On s’est regroupé à huit tours de l’arrivée. Dès lors, j’ai vraiment visé le titre du scratch et de l’omnium. J’avais un gros sprint à l’arrivée, les jambes ont bien répondu. Tout ça se concrétise par ces deux médailles d’or, ce fut donc plus qu’une bonne journée. C’est un championnat plus que réussi, une 5e place au km anecdotique parce qu’il y a beaucoup de spécialistes aujourd’hui. On passe à côté de la médaille en vitesse par équipe avec une nouvelle stratégie mise en place. Celle-ci semble très intéressante. On verra la progression mais le podium aux Jeux est envisageable. »
    

Alexandre Léauté (MC2), après ses deux derniers titres sur scratch et omnium :
« L’objectif était de protéger ma place à l’omnium. Cela passait par un bon scratch. Je me suis donc focalisé sur la course avec Florian (Chapeau). On a essayé de faire en sorte de finir tous les deux sur le podium. Ça n’a pas pu le faire pour lui mais pour moi ce fut assez exceptionnel Quatre courses, quatre or, je ne pouvais pas rêver mieux. C’est incroyable. »

Alexandre Léauté (MC2) après l’or en poursuite 3 km devant le Belge Vromant et le Japonais Kawamoto : 
« La poursuite du matin m’a permis de me débloquer et de cerner un peu mes adversaires. J’ai ainsi pu dérouler ma finale. J’aurai bien aimé finir ma poursuite pour avoir un temps, j’ai rattrapé le belge donc c’est de bon augure. J’ai déjà réalisé e plus gros objectif que l’on s’était fixé avec Mathieu Jeanne. Maintenant, il faut prendre du plaisir et toujours pédaler aussi fort pour faire retentir le plus de Marseillaise possible. Les Jeux, j’essaie de ne pas me projeter. Je vais y aller étape par étape, j’ai connu des périodes difficiles en y pensant donc je vais penser à ces monde et aux deux coupes du monde sur route qui vont arriver avant Paris. » 

Alexandre Léauté (MC2) après l’or sur le km :
« Gagner le titre et conserver mon record du monde, c’était l’objectif. Marquer de gros points pour l’omnium était aussi important. Le record du monde n’était pas prévu à la base mais on prend. Ça fait un record en plus et ça montre que la forme est là. Ça finit très tard, les épreuves s’enchaînent donc c’est très difficile mais on est entraîné pour ça donc il n’y a pas de raison que ça ne fonctionne pas. »

Heidi Gaugain : (WC5) or sur 3 km poursuite qui s’est gagnée dans les deux derniers tours :
« C’était super serré avec la Néo-Zélandaise. Elle est partie très vite quand je suis partie dans mes allures. J’avais comme consigne, sur les six derniers tours, de débrancher le cerveau et d’être à bloc. On ne me donnait donc même pas mes temps mais mes retards. On me donnait beaucoup de retards mais après sur les six derniers tours, je suis passée en avance. J’ai continué à me mettre minable jusqu’au bout mais c’était une belle bataille. Je suis contente même si j’aurais vraiment aimé faire un bien meilleur temps, c’est anecdotique. Je retiens de m’être bien battue avec mon mental et avec ce que j’avais. »

Kévin Le Cunff or sur 15 km scratch : 
« Avec Gatien (Le Rousseau), on s’est mis d’accord. On a laissé travailler l’Anglais qui perdait son sang froid. Il avait gagné l’an dernier. On voyait bien qu’il ne voulait laisser sortir personne. On l’a laissé faire le boulot pendant les 15-20 premiers tours. Puis on a attaqué chacun notre tour, avec Gatien, et il a fini par céder. C’est tombé sur moi, cela aurait pu être Gatien. C’est comme une course par équipe. J’ai mis une dizaine de tours à prendre un tour au peloton mais une fois rentré je savais que c’était gagné. Je n’ai pas voulu me mettre dans le rouge dans cette poursuite. J’ai plutôt géré mon effort. Même si je rentrais, il fallait être capable de maîtriser les autres attaques. Comme j’avais un tour, j’ai pu un peu regarder le final de loin et quand j’ai vu Gatien passer et finir 2e, c’était génial. »

Gatien Le Rousseau (MC4) après l’or sur l’omnium : 
« Il y avait la finale du km samedi mais j’étais déjà assuré de l’or donc le but était de prendre de l’expérience et d’habituer le corps à doubler des efforts aussi intenses dans une même journée. Au niveau mental, je pense avoir moins poussé l’après-midi que le matin mais ça fait quand un bel effort et de bonnes intensité pour la suite. J’ai plutôt bien digéré ce double effort, je pense que je récupère mieux qu’avant, notamment grâce à la muscu faite cet hiver. Après, je suis loin de la gagne, ce n’est pas l’objectif, je suis davantage sur la poursuite. Mais ça reste une épreuve qui est au programme des Jeux paralympiques si je suis qualifié. »

PARACYCLISME RIO / Championnats du monde sur piste - Rio de Janeiro 2024

Toutes les photos de l’événement signées Jean-Baptiste Benavent

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