A+A-

Report des Jeux, quels impacts sur le monde handisport ?

24 avril 2020
Les Jeux Paralympiques de Tokyo prévus cette année ont été reportés en 2021 (24 août au 5 septembre 2021) à cause de la pandémie de Coronavirus. Si ce report était attendu, voire espéré, il repousse d’un an les carrières, les objectifs, les rêves. Norbert Krantz, directeur des équipes de France Handisport des sports d’été, fait le point sur l’impact de la situation sur le monde de Handisport et sur le futur qu’il faut déjà penser.

Comment a été perçue l’annonce du report des Jeux Paralympiques de Tokyo ?
Norbert Krantz : Elle a été considérée comme un soulagement parce qu’enfin le voile a pu être levé. Il n’y a pas de pire mal que de rester dans l’incertitude, que celui de ne pas savoir si les événements pour lesquels on se prépare depuis des années auront lieu ou non ! Il va y avoir des deuils à faire, la réalité est différente de celle que chacun avait imaginée.
 
Etait-ce la meilleure solution à vos yeux ?
N.K : Oui, il n’y en avait pas d’autres envisageables. Au début, personne ne savait quelles proportions cette épidémie pouvait prendre. Petit à petit, le monde a compris qu’il s’agissait de quelque chose de sérieux, qui touchait la planète entière. Je pense que si les Jeux avaient été maintenus, ils auraient perdu de leur humanité et de leur équité.
 
Etes-vous déjà sur un nouveau calendrier de préparation ?
N.K : Forcément, un nouveau calendrier va être mis en place qui proposera de nouvelles échéances compétitives et de nouvelles modalités de qualifications. Mais il est encore trop tôt pour pouvoir connaitre les dates et lieux qui feront office de référence. Nous allons suivre avec une attention particulière la parution de ces informations afin de pouvoir réagir au plus vite.
 
Comment remobiliser les athlètes pour 2021 ?
N.K : Il va falloir mettre en place des stratégies de « coping » collectives et individuelles, c’est-à-dire comment savoir faire face à cette nouvelle situation. On ne sait pas encore comment chacun de nos sportifs va réagir mais nous allons les sonder. L’impact d’un certain nombre de facteurs va certainement jouer sur leur capacité de mobilisation comme le statut (déjà qualifié ou pas, plus ou moins médaillable), la nature de la discipline, le temps disponible, les types de motivation, etc. Il y aura trois phases à mettre en place avec des temporalités différentes : une phase de transition notamment d’un point de vue mental, une phase de reconstruction ou de reconditionnement ou encore de réengagement, et une phase de développement et d’affûtage.
 
Comment est vécu le confinement par les sportifs de haut-niveau, avez-vous des retours ?
N.K : Nous n’avons aucune alarme à ce sujet. Il a cependant été demandé à chacun nos Directeurs sportifs et Head coachs de veiller à ce que chacun puisse bénéficier d’une attention soutenue. Et nous avons prévu, si le besoin s’en faisait ressentir, de mettre en relation tout sportif qui en exprimerait le besoin avec un psychologue, expert dans la résolution de ce genre de problème.
 
Qu’avez-vous mis en place dès le début du confinement pour soutenir les athlètes ?
N.K : Tout d’abord du lien et de l’écoute. Ensuite le déploiement d’un discours positif. On a également invité à lutter contre le « désentraînement » en essayant de préserver un minimum de condition physique ainsi qu’une proposition à anticiper la période de reprise (programmation). Enfin, du partage d’informations concernant le calendrier sportif pour alimenter le ressort principal qui permet aux sportifs de haut niveau de s’engager à nouveau dans les tâches et charges d’entrainement. Nous avons également ouvert une plateforme, ou banque de données, qui devrait permettre à chacun de prendre part aux différentes réflexions qui animent le champ des pratiques sportives de haut niveau.   
 
Cette crise du coronavirus chamboule le monde sportif dans son ensemble. Comment trouver la motivation pour l’avenir ?
N.K : Pour les athlètes qui étaient en difficulté dans la course à la qualification, une chance nouvelle leur est donnée puisqu’ils vont pouvoir bénéficier d’un peu de plus de temps qu’ils ne l’avaient prévu , pour se préparer et se qualifier. Après je ne vais pas vous mentir, nous avions vraiment envie « d’en découdre ». Il est très difficile de voir ce que le monde sportif peut retirer de ce chamboulement, l’ensemble des adaptations forcées que nous allons devoir conduire va modifier la stratégie d’ensemble que nous avions prévue de mettre en place, tout de suite après Tokyo et dans la perspective de Paris 2024. Les entraineurs actuellement en place vont devoir prolonger leur contrat pour ceux qui le peuvent, tandis que se préparera la mise en place de ceux qui seront en charge de la préparation dans le cadre des Jeux de 2024. Il va falloir faire cohabiter l’ensemble des collègues, ne pas hypothéquer les résultats que l’on peut obtenir à Tokyo en 2021, et mettre en place l’accélération que nous appelons de nos vœux pour préparer la suite. Les seuls éléments positifs que je vois pour l’instant sont liés aux impacts sur le bonheur des humains : je pense que la cérémonie d’ouverture des Jeux à Tokyo sera particulièrement émouvante, comme un hymne de joie face la désolation créée par le virus.

Propos recueillis par R.Goude


À lire aussi

Un report pour vivre pleinement les Jeux 

Le confinement, quelles conséquences ?

La danse, l’activité qui se marie avec le confinement

Autres articles sur ce thème : Actualité / Jeux Paralympiques / Multisports
haut de page