Comment qualifiez-vous votre bilan et cette 9e place sur ces championnats du monde ?
Stéphane Binot : C’est avant tout un retour sur la scène mondiale de l’équipe de France qui n’avait plus participé à un championnat du monde depuis 2010. Vice-champions du monde il y a treize ans, les Bleus, derniers du championnat d’Europe A, avaient été relégués en championnat d’Europe B dès 2011.
Depuis 2017, on a installé à nouveau l’équipe de France dans le groupe A des championnats d’Europe, décrochant même la 5e et dernière place qualificative pour ces Mondiaux lors du dernier Euro, en 2021. Globalement, on pouvait prétendre à mieux mais on avait aussi le risque de faire pire au regard du tirage.
Comment ça ?
S. B : On est tombé dans un groupe et sur des croisements des plus complexes. En effet, dans notre poule, nous avions l’Argentine, vice-champion d’Amérique du Sud, que nous avons battu ; le champion d’Asie, la Corée, contre qui nous perdons de deux points et les Pays-Bas, champions d’Europe, qui par le profil de sa formation, nous pose toujours de problèmes. Puis 8e de finale contre l’Iran, 3e de ces championnats du monde, qui a mis notamment 15 points aux Hollandais.
Votre défaite contre l’Iran reste donc encourageante ?
S. B : Oui. On fait notre match le plus abouti contre cette équipe puisque nous sommes à dix points (69-79). Après, on a affronté des équipes qui ont mieux joué que nous ou qui ont fait preuve de plus de solidité sur 40 minutes. Mais au regard de la différence de niveau des deux groupes, je pense que la France a un niveau situé entre la 5e et la 8e place. On peut légitimement espérer battre le Canada, l’Italie, l’Allemagne ou encore l’Australie. Au risque de me répéter, il me semble qu’à l’exception des Pays-Bas et de l’Angleterre, on peut rivaliser avec tout le monde. J’en veux pour preuve, nos matches amicaux contre les États-Unis (-7), l’Allemagne (+6). En tout cas, on avance bien dans l’optique des championnats d’Europe qui seront une nouvelle chance de qualification pour les Jeux Paralympiques. Les finalistes verront Paris 2024 à coup sûr. Sinon, il faudra passer par le Tournoi de Qualification Paralympique mondial qui se tiendra en avril 2024 à Antibes (France), où quatre places seront mises en jeu.
Quels sont les enseignements positifs ?
S. B : La progression de l’équipe et l’évolution tactique des joueurs comme du staff. On a pu effectuer beaucoup de travail d’analyse vidéo, partagé avec les joueurs et au sein même du staff. Cet aspect nous démontre à quel point disputer des matches amicaux est primordial parce que nous sommes mis en difficultés et dans l’obligation de trouver des solutions. L’entraînement est important mais se confronter à des systèmes de jeu, des approches tactiques différentes est indispensable. Les Pays-Bas, eux, ont disputé 22 matches amicaux en un mois et demi quand nous en avons joué six pour préparer ces championnats du monde et disputé un tournoi, organisé avec la MFR Ifacom La Ferrière en mars. Nous y avions affronté l’Italie et Israël. Ce déficit de vécu et d’expérience de matches pèsent aussi sur la capacité d’analyse des staffs qui peuvent alors travailler sur du concret pour imaginer des solutions, des nouveaux schémas et affiner leurs choix. On ne s’engage pas de la même manière à l’entraînement.
Avez-vous la sensation qu’un groupe prend forme ou que des joueurs s’installent ?
S. B : Des joueurs prennent de l’épaisseur, à l’image d’Alexis Ramonet, à qui on doit, je pense encore davantage de temps de jeu. Ceci dit, il figure parmi les joueurs ayant une forte classification (4 points) donc l’association avec les autres joueurs est un peu plus complexe. Je pense que ce sont des révélations. Les réflexions doivent se faire autour de l’idée d’avoir un cinq plus expérimenté et un cinq peut-être plus agressif défensivement et plus mobile en attaque, avec nos plus jeunes joueurs (Alexis Ramonet, Louis Hardouin, Mamady Traoré). Il y a des réflexions sur les choix des cinq, du travail à effectuer aussi auprès des joueurs sur l’acceptation du choix des hommes par le staff.
© C. Jouanserre
C’est-à-dire ?
S. B : Il y a douze joueurs et des choix sont faits en fonction de l’adversaire ou d’une composition d’équipe plus à-même de rivaliser avec l’opposition proposée. S’il y a encore du travail sur ce point, on sent une vraie progression. Il faut aussi que nous soyons clairs dans nos choix et dans nos compositions.
Quelles sont les pistes de travail à court terme parce que l’Euro va venir très vite ?
S. B : On doit réellement définir un cinq entrant, dit majeur, et un autre cinq avec un style de jeu complètement différent qui viendrait en second couteau, sans oublier les changements traditionnels. Par ailleurs, nous devons encore travailler l’aspect défensif. On encaisse encore trop de points ce qui nous rend trop dépendant de notre adresse. Nous ne sommes pas encore assez rigoureux défensivement pour remporter un match sur cet aspect.
Qu’est-ce que le report de ce championnat du monde initialement prévu en 2022 à modifier en termes de préparation et d’organisation ?
S. B : L’organisation sur place, en matière d’accueil et de conditions de jeu, a été top. Seul regret : le manque de matches de classement intermédiaires. On a joué jeudi dernier notre 8e de finale et notre match unique match de classement pour la 9e place contre le Brésil, lundi. Soit quatre jours après. C’est un peu dommage mais c’est la formule. Néanmoins, je pense qu’un retour à la formule précédente, avec des matches de classement croisés en étant éliminés en 8e de finale, est plus adapté. Le temps fut un peu long pour tout le monde. Ce format de compétition n’est pas à l’avantage des sportifs. Quant à ce report, s’il nous a permis de nous entraîner davantage, il ne nous a pas offert, comme je l’ai déjà dit, la possibilité de jouer davantage de matches amicaux contre d’autres équipes nationales. Cela nous aurait permis d’être plus précis dans certains choix et plans de jeu.
Jouer plus de matches amicaux d’ici à l’Euro est envisagé ou envisageable ?
S. B : Nous allons disputer trois matches lors d’un tournoi en Suisse du 27 au 30 juillet. Mais nous aurons aussi ceux de ces championnats du monde à analyser. Nous avons de la matière et des conséquences à tirer de tout ce qui a été fait. Au regard de la proximité de l’Euro à venir, ces championnats du monde faisaient office de préparation aux compétitions “immanquables” qui se profilent. Et ce, même si nous avions tous envie de terminer sur la plus haute marche possible.
Rédaction : J. Soyer
Poule B : Argentine – France : 57-77. Pays-Bas – France : 77-46. Corée du Sud – France : 66-64. 8e de finale : Iran – France : 79-69. Match pour la 9e place : France – Brésil : 83-63.
Le classement : 1. États-Unis, 2. Grande Bretagne, 3. Iran, 4. Pays-Bas, 5. Italie, 6. Canada, 7. Australie, 8. Allemagne, 9. France, 10. Argentine, 11. Argentine, 12. Thaïlande, 13. Corée du Sud 14. Égypte, 15.Irak, 16. Émirats Arabes-Unis.
Le groupe France : Ibrahim Guirassy (Gennevilliers, 1 pt), Jérôme Laureri (Hyères, 1 pt), Audrey Cayol (Meaux, 1,5 pts), Jérôme Duran (Hyères, 2 pt), Rémi Bayle (Le Puy-en-Velay, 2,5 pts), Louis Hardouin (Wiesbaden –All -, 2,5 pts), Sofyane Mehiaoui (Gennevilliers, 3 pts), Christophe Carlier (Le Cannet, 3 pts), Houcine Belaid (Le Cannet, 3,5 pts), Mamady Traoré (Hambourg – All -, 4 pts), Alexis Ramonet (Gran Canaria – Esp -, 4 pts), Nicolas Jouanserre (Hyères, 4,5 pts).
Le staff tricolore : Karim El Gueddari (sélectionneur), Stéphane Binot (DS), Francis Dandine (manager de la performance), Lionel Chavane (logisticien), Nadia Hadjali (infirmière), Manon Camboulives (kinésithérapeute), Luc-Daniel Lacombe (mécanicien), Dominique Blot (analyste vidéo), Loïc Rouiller (préparateur physique).
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